Je suis la dame-qui-fait-chut-!
Quatre heures entre quatre murs gris et sales, à soulever de la poussière. Oui, mais. Mais quatre heures à ranger, trier, déplacer, mettre en ordre des livres. Quatre heures au CDI, à faire le travail de documentaliste pour lequel on m'a embauchée et pour lequel je n'ai aucune qualification.
Le documentaliste en chef (le prof de philo), m'a expliqué qu'il fallait jeter les trois quarts des livres spécialisés qui se décomposaient au fond de la pièce, derrière leur vitrine crasseuse. Au début, j'ai tiqué : jeter des livres ? Mais quelle idée ! Voilà bien un dada de prof de philo (car tout le monde sait qu'« un pocket, ça se jette! »). Puis je vais voir, au fond, lesdits livres à jeter. Et bien, entre les livres d'anatomie datant d'avant 1950, les traités de spiritualité douteux et les essais sur la vie des noirs dans les colonies (sic), le tri a été rapide, implacable, rigoureux et drastique*. C'en devenait dangereux, à force ! Imaginez un innocent (ou presque), lisant Le Métier de femme, ouvrage louche datant des années 60. Je ne parle même pas des perles comme Visions du futur, qui nous présentent les vols Paris-New-York en vingt-cinq minutes grâce aux fusées de transport... pour 1965** ! Si si ! C'est vrai, je ne mens pas.
Arrivée au rayon spiritualité et religion, j'ai quand même freiné mes ardeurs, jusqu'à ce que mon collègue me rassure en me racontant qu'il avait menacé les bonnes sœurs (n'oublions pas qu'il s'agit là d'un collège privé) de brûler leurs étagères. C'est plutôt rassurant de voir un professeur de philo qui ne soit pas trop mystique ^^ Du coup, hop ! Tout (ou presque) à la benne !
Au bout de quatre heures, j'avais trié le contenu de trois bibliothèques, libéré un meuble, rangé le reste correctement. S'il y a une chose à laquelle je n'ai pas touché, ce sont les philosophes (on ne jette pas un Budé de Platon, non mais). Car ils ne périment pas. Et j'ai aussi trouvé le temps de trier les romans jeunesse par ordre alphabétique d'auteurs.
La semaine prochaine, j'attaque les zones floues de la géographie, d'étude de la faune, des monuments historiques, des arts et de la littérature...
*Pas d'inquiétude cependant, les "beaux" vieux livres sont conservés afin de constituer une étagère spéciale.
**Celui-ci, on l'a laissé.