Cyrano de Bergerac
Hier soir, un rêve est devenu réalité. J’ai vu, jouée sur scène, la pièce d’Edmond Rostand, celle dont le texte est tellement beau qu’il n’est pas de mots suffisants pour exprimer ce que l’on ressent en la lisant – que dire donc en l’entendant, en la voyant ? – Cyrano de Bergerac.
La mise en scène, quoique résolument contemporaine, n’empiétait pas sur le texte. Bien au contraire. Et l’excellence des acteurs n’était pas pour rien dans le sextuple rappel qu’ils ont obtenu à la fin.
Une salle carrelée de blanc, meubles anguleux en métal et formica, néons suspendus pour tout éclairage. C’est clinique et peu hospitalier. Les personnages sont en jogging, ont des tocs étranges, déambulent comme des fous dans un asile. Ici point de panaches et d’épées : les poings suffisent.
Dit comme ça, ça ne donne peut-être pas très envie, mais qu’importe. La beauté du texte était entière, pleine. Les gestes amplifiaient le burlesque de certaines répliques, et à tout instant, on voyait la grandeur du personnage qu’est Cyrano. Sa grandeur d’âme, son cœur immense. Et ces vers… les lignes du baiser, susurrées sur un Skype fictif, m’ont émue aux larmes, après que le bruitage de la célèbre messagerie a faire rire la salle comble.
Le jeu était extrêmement dynamique, les acteurs touchants et l’on pouvait savourer pleinement chaque syllabe, chaque rime avec extase. C’était exquis.
"C’est bien plus beau lorsque c’est inutile !" s'exclame notre héros juste avant de mourir : cette phrase merveilleuse devrait être la devise de tous les amoureux du latin et du grec...