Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité

Vous en parlerez à votre cheval...

30 novembre 2013

Dora

Titre: Dora et Dora, l'année suivante à Bobigny
Auteur: Ignacio Minaverry
Editeur: L'Agrume (2012 et 2013)

La cueillette de cette année au Salon du Livre Jeunesse de Montreuil s'est révélée fructueuse (au grand dam de ma banquière). Je commencerai donc par la lecture d'une bande dessinée (ou roman graphique, comme vous voulez, je ne suis pas sectaire) qui m'avait déjà intriguée il y a quelques mois chez Gibert. Cet ouvrage, en deux volumes, s'intitule Dora (non, pas l'exploratrice), le second volume portant le sous-titre "L'Année suivante à Bobigny".

Dora

Il s'agit d'un drôle de mélange: tout à la fois quête initiatique et documentaire historique, avec des accents de roman d'espionnage, s'ajoute à la suite des questions sur l'amour, la sexualité, la politique. On pourrait penser que ça fait beaucoup pour un seul livre. Mais au contraire, tous ces aspects se croisent et s'enrichissent les uns les autres.

Le trait est simple, noir et blanc au contraste bien marqué, qui n'est pas sans rappeler celui de Marjane Satrapi ou Kiriko Nananan. De temps en temps, une touche de couleur vient faire violence à l'harmonie de la page.

Quant à la narration, elle évolue. Le point de vue interne de la protagoniste entrecoupé de textes d'archive dans le premier volume se fait chorale dans la suite. Trois narratrices prennent tour à tour la parole, racontant une histoire à trois voix. Trois histoires qui s'entrecoupent et se rejoignent dans les quartiers de la cité HLM. La quête du passé et la chasse aux nazis perdent un peu de terrain, l'actualité de la guerre d'Algérie prend corps dans la banlieue communiste, où les jeunes des bidonvilles luttent et grandissent.

On suit l'histoire non seulement parce qu'elle est riche et intéressante, mais aussi parce qu'elle est bien racontée et qu'on s'attache à ses personnages.

Petit bonus: on ne lit pas tous les jours de la bande dessinée argentine !

Publicité
23 novembre 2013

Bruxelles

Non, non, je ne suis pas morte, je suis même en bonne santé d'après mon médecin. Et l'on m'a fait comprendre que les culs nus de ces messieurs commençaient à vous lasser. Alors me revoilà. Et je vais vous parler un peu de Bruxelles, où j'ai été le mois dernier. Je ne vais pas en faire un récit circonstancié, parce que je n'en ai pas l'envie, pas le temps et pas le courage, mais sans doute une liste de phrases plus ou moins complexes fera-t-elle l'affaire.

- Nous voulions revenir sur les impressions de notre premier voyage, un week-end pendant lequel il avait plu non-stop. J'avais oublié mon appareil photo, ou pas voulu le sortir de mon sac. Nous avions été réveillées aux aurores un dimanche matin, par des ouvriers sur un échaffaudage à notre fenêtre.

- Nous sommes en effet revenues sur notre opinion. Sous le soleil, Bruxelles est bien plus belle.

- Nous logions chez l'habitant, dans un quartier excentré mais calme et à deux pas du métro. L'appartement était immense et nos hôtes charmants.

large

- Le marché aux puces avait un air de Tintin et le secret de La Licorne. Au-dessus de nos têtes se découpait les échaffaudages du palais de justice. Il faisait doux sous la verrière du petit restaurant, à l'étage, vue sur la place et la foule de badauds. Le quartier des marolles et ses petites rues faisaient une bonne promenade.

P1030632

- Louvain-la-Neuve, ce n'est pas la porte à côté. Plus d'une heure de train pour arriver, et rien à voir dans cette petite ville de banlieue. Rien sauf le Musée Hergé. Ouvert en 2009, ce bâtiment résolument contemporain est des plus agréables. La visite (quand on la commence au bon endroit), suit un parcours qui traverse quatre zones, et l'on passe d'une zone à l'autre par des passerelles. La vie d'Hergé est évoquée, bien sûr, ainsi que toutes ses oeuvres. La scénographie est agréable, ludique sans être enfantine, on apprend tout en évoluant au travers des vitrines et des originaux. J'avais peur que ce ne soit lassant (j'aime énormément Tintin, mais les monographies, c'est toujours risqué), et j'ai été étonnée du résultat. (Et je ne me suis pas remise d'avoir découvert qu'Hergé travaillait avec des assistants, comme un mangaka.)

P1030680

- La promenade des fresques murales est longue. Nous avons marché toute la journée, et traversé presque tous les quartiers de la ville, depuis les boutiques les plus luxueuses jusqu'aux quartiers d'habitation les plus populaires avec leurs barres d'immeubles façon HLM. Nous n'avons pas trouvé le Chat, et sur la fin, nous avons fait quelques coupes dans notre liste.

P1030694

- Nous avons découvert un café qui proposait une formule petit-déjeuner même à 11h, et passait du Césaria Evora et du Lhassa en fond sonore.

- Nous avons bu de la bière et dîné dans une brasserie historique (La Mort Subite) et déjeuné chez Les Filles autour d'une grande table d'un repas simple mais exquis (velouté de chou-fleur, salade de betterave-mandarine, terrine de lièvre aux noix, rôti de boeuf au pistou, petits gâteaux aux pommes fondant dans la bouche).

P1030687

- Nous sommes retournées au Centre Belge de de Bande Dessinée (CBBD). Le quartier est vraiment chouette, le bâtiment toujours aussi beau. Les expositions avaient changé, depuis la dernière fois. L'une d'entre elles détaillait toutes les étapes de création d'une BD.

- Nous avons salivé devant les vitrines des chocolatiers de la galerie Saint-Hubert. Les boutiques restent ouvertes jusque tard le soir, les pas résonnent sous l'immense verrière.

P1030745

30 octobre 2013

Masculin / Masculin

Les affiches - se répondant à la perfection - sont réussies et appâtent les clients en nombre: il suffit de voir la file d'attente devant le musée à midi quand nous arrivons, et la même, dix fois plus longue, quand nous sortons à quinze heure. Le thème promet une variété de styles et de supports qui n'est pas pour me déplaire, des représentations mythologiques à la pelle (Hermès et Pâris en couverture, rien que ça) et en plus, paraît-il, le parcours est thématique et non chronologique, ce qui a l'heur de permettre des comparaisons sympathiques entre œuvres d'époques très différentes.

masculin-masculin

Cependant, nombreux furent déçus (il suffit de lire la critique d'Evene, qui ne cache pas son insatisfaction). Pas assez scientifique selon les uns, manque d'un objectif clair (à part montrer des représentations d'hommes nus, cela va sans dire) pour d'autres. Et c'est vrai, quand on prend le temps de lire les explications (ou du moins certains passages du catalogue de l'exposition), on comprend assez rapidement que l'homme nu est sous-représenté dans l'art de nos jours et que ce n'était pas le cas autrefois, bla bla bla. Que les nus féminins choquent beaucoup moins aujourd'hui, bla bla bla. Jamais n'est posée la question de ce que cela peut signifier sur notre société ou autres questions qui viennent à l'esprit quand on compare les représentations féminines et masculines. En outre, les commissaires de l'exposition sont partis du principe que tout le monde avait les représentations féminines en tête. Résultat: nous n'avions aucun point de comparaison, ce qui, pur certaines œuvres eût été on ne peut plus pertinent. Mais je ne m’appesantirai pas sur la question, parce que cette exposition, en fin de compte, je l'ai bien aimée.

etudes

1. Edmond Lebel, Etude de nu masculin de dos (1850)
2. Hermann Heid et Louis Igout, Académies de nus masculins (1875-1880)

En effet, je ne cherche pas forcément à me creuser la cervelle quand je vais voir une exposition. En général, j'attends de voir des œuvres plus ou moins connues, des œuvres que je n'aurai pas forcément la chance d'aller voir dans leur musée, des œuvres de collections particulières qui ne sortent que rarement de chez elles, ou de revoir des œuvres que j'ai aperçues à l'autre bout de l'Europe, un jour. De ce côté-là, j'ai été plus que satisfaite. Je lis rarement les explications, écrites dans une police trop petite pour mes yeux de myope, sur un mur trop sombre pour que le contraste soit bon, avec trop de gens devant pour que je puisse m'en approcher. Sans compter ma paresse sans égale.

comparaison

1. Flandrin Hippolyte, Jeune homme nu assis au bord de la mer, étude (1836)
2. Wilhelm von Gloeden, Cain, Taormine (1913)
3. Robert Mapplethorpe, Ajitto (1981)

De plus, le parcours étant thématique, j'ai trouvé que l'on ne s'ennuyait pas. Je ne dis pas que les choix des thèmes étaient pertinents ou que le choix des œuvres pour chaque thème était parfait, loin de là (avec Evene, je me demande pourquoi n'avoir pas fait un salle dédiée au martyr de Saint Sébastien, pourquoi l'avoir fait apparaître dans plusieurs thématiques, quand on avait matière à ergoter sur cet épisode biblique cher aux peintres de toutes les époques), mais l'alternance de peintures ultra-classiques, de sculptures (peut-être pas assez), de tableaux plus récents et de photographies m'ont gardée en éveil jusqu'à la fin de l'exposition.

orgueil

1. Francois-Léon Bénouville, La Colère d'Achille (1847)
2. Auguste Rodin, Etude de nu de Balzac (vers 1894)

Pour ma part, j'ai trouvé ça suffisant. J'aurais payé mon entrée, peut-être aurais-je grincé des dents, mais comme ce n'était pas le cas, je ne me plains pas. En fait, cette exposition est comme un index thématique, qui donne envie d'explorer bon nombre de pistes, comme un catalogue de références. C'est déjà pas si mal, non ?

Paul Marie Pierre Richer - Athlètes 1895

Paul-Marie-Pierre Richer, Athlètes (1895)

16 octobre 2013

Souvenir de lycée

joseph désiré court - la mort d'hippolyte 1825

Joseph Désiré Court, La Mort d'Hippolyte, 1825

 « De son généreux sang la trace nous conduit,
Les rochers en sont teints, les ronces dégouttantes
Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes. »

(Jean Racine, Phèdre, V-6 - Récit de Théramène racontant la mort d'Hippolyte)

15 octobre 2013

Swan Lake

Trois semaines après, c'est un bon délai pour écrire la "critique" d'un spectacle. D'un ballet plus exactement. Pour être précise, je peux ajouter qu'il s'agit de Swan Lake, chorégraphié par Dada Masilo. Et si "critique" est entre guillemets, c'est parce que je serais bien incapable d'écrire la moindre critique. Il s'agit là plutôt d'un commentaire, assez naïf d'une spectatrice qui n'a pas vraiment l'habitude d'aller voir des ballets. Pour lire la critique (sans guillemets) d'une connaisseuse, c'est par ici.


Cygnes sud-africains / Swan Lake par WebTV_du_Rond-Point

 Le spectacle commençait tôt, au théâtre du Rond-Point, et finissait une heure plus tard. Aussi sommes-nous ressorties alors qu'il ne faisait pas encore nuit sur les champs-Elysées, et que le soleil commençait à descendre sur la Tour Eiffel, la Seine et le Pont Alexandre III.

Une réécriture du Lac des cygnes qui mêle danse classique et danse africaine, qui parle d'homosexualité, de mariage forcé et de sida, c'est ce qu'annonçait l'affiche. Un programme chargé, pour une heure de spectacle !

J'ai beaucoup aimé la première partie, parodique, drôle, enlevée. J'avais déjà vu ce mélange de danse classique et de danse africaine, il y plusieurs années, à Saint-Quentin, quand j'avais été voir On danse, de Montalvo et Hervieu. Et j'avais aimé. Je dois reconnaître que c'est assez jubilatoire, cette danse sans retenue, qui donne toute son énergie, sans contrôle apparent. Bien sûr, en réalité, tout est contrôlé, mais je ne peux m'empêcher d'apprécier ces pied nus, ancrés sur le sol, qui martèlent joie et colère. Sans doute cette gestuelle me parle-t-elle plus que les codes de la danse classique.

Qu'importe. Le début est parodique. La narratrice prend la parole - l'anglais n'est pas toujours évident à comprendre du fond de la salle - et nous explique ce qui se passe dans un ballet. C'est assez tordant. S'ensuit le mariage, forcé, où l'on voit le prince qui renâcle. Tout le monde en tutu, hommes et femmes, sauf le prince. Et c'est la fête, tout le monde est heureux, sauf le prince. Arrive alors un second cygne, qui lui a l'heur de plaire au prince. Mais ce cygne est un homme, et les autres le conspuent. On le montre du doigt, la jeune fille pleure, la mère s'effondre.

On aurait pu s'arrêter sur ce drama, à la fois drôle et faisant preuve d'une unité honorable. Mais c'est alors que tout le monde revient sur scène, les tutus aux vestiaires au profit de jupes noires. La mort du cygne donne l'impression d'être un passage obligé. Ici, il fait référence au sida, d'après le programme. Personnellement, je n'y ai pas vu grand chose, et je m'y suis ennuyée ferme. Je guettais le retour d'une pointe parodique, d'un clin d'oeil, mais non. Dommage.

En bonus de cet article trop vite rédigé, une parodie du Lac des cygnessur pointes !

Publicité
14 octobre 2013

Club BD, cru 2013 - 4. Dengeki Daisy

Titre: Dengeki Daisy, t.1
Auteur: Hyousuke Motomi
Editeur: Kazé (2010)

Dengeki Daisy - 1

Ce titre m'a été prêté par une amie. Ayant personnellement beaucoup de mal avec les shôjo (manga pour filles), je n'en lis pour ainsi dire aucun. Seule exception notable il y a fort longtemps pour l'étrange Infirmerie après les cours. Aussi, quand cette amie m'a présenté Dengeki Daisy, j'ai mis un certain temps à commencer les volumes qui attendaient sur ma table de nuit.

Finalement, j'ai été agréablement surprise. Le dessin n'est pas fou, et l'histoire n'échappe pas à quelques clichés. Mais dans l'ensemble, c'est drôle et léger. Enfin, au début, du moins. L'héroïne, Teru, est seule au monde depuis la mort de son grand frère. La seule personne qui veille sur elle est un dénommé Daisy, avec qui elle ne communique que par mails.

C'est vrai, c'est bizarre comme synopsis. Mais on fait avec ce qu'on a. Là où le manga est bien, c'est que l'héroïne, qui aurait pu être complètement ramollie du cerveau - à l'instar de Tohru dans Fruits basket, - a un caractère bien trempé. Elle une boulette finie, mais ne se laisse pas marcher sur les pieds pour autant.

Autour d'elle et de la mort de son frère plane un mystère. Des histoires de virus informatique, de piratage, de sécurité nationale. Comme toute héroïne de shôjo, elle a un certain nombre de squelettes dans le placard familial. A certains moments, le suspens efface presque complètement l'histoire d'amour sous-jacente, et c'est des plus agréables. Quelques bouffés d'air frais pour qui n'aime pas franchement les romances trop sucrés des mangas "pour filles". Et l'humour est omniprésent, même lorsque l'histoire devient trop lourde, ce qui allège sensiblement l'ambiance.

Un manga à essayer, fille ou garçon (il ne faut pas se laisser faire par la classification genrée des éditeurs).

13 octobre 2013

Club BD, cru 2013 - 3. Barakamon

Titre: Barakamon, t.1
Auteur: Satsuki Yoshino
Editeur: Ki-oon (2012)

Barakamon - 1

Toujours dans l'optique "plus de mangas", j'ai également pris - au hasard encore une fois - Barakamon sur l'étagère des nouveautés. (Ce qu'un livre édité en 2012 faisait sur l'étagère des nouveautés à la fin de l'été 2013 reste un mystère... peut-être a-t-il été mis en avant pour la sortie du tome 6.)

Barakamon, c'est l'histoire d'un calligraphe imbu de sa personne, jeune prodige au talent reconnu par tous. Jusqu'au jour où un conservateur de musée juge son travail insipide: notre jeune calligraphe, piqué au vif, le frappe, mettant ainsi en péril sa carrière. Afin de réfléchir à ses actes et de se calmer, on l'envoie sur une petite île perdue au fin fond de la province. Dure sanction pour un citadin qui aime briller en société !

Ce titre, je l'ai choisi parce qu'il y avait de la calligraphie au coeur de l'histoire. Et aussi parce que ça se passait à la campagne. Pour qui a lu le délicieux Manabé Shima de Florent Chavouet (carnet de voyage-bande dessinée réalisé après un séjour dans un minuscule village de pêcheurs sur une île du Japon), le contexte n'est pas le moins du monde dépaysant. Cette peinture rurale est tout-à-fait savoureuse, et les personnages hauts en couleurs.

Ce qui est très appréciable avec ce manga, c'est qu'il est à peu près inclassable. Avant lecture, je l'aurais volontiers rangé avec les shônen, mais par la suite, je suis restée dubitative. Pas d'action, pas de grands élans d'amitié, pas (encore) d'histoire familiale dramatique... Juste un personnage insupportable, qui s'adoucit au contact de la population locale, dénuée de préjugés et assez franche, une gamine pot-de-colle et des tas d'autres perssonages qu'il fait bon croiser au détour d'une page. L'histoire est bien, les personnages attachants et l'ambiance très plaisante. On ressort de cette lecture d'excellente humeur, et avec l'agréable impression d'avoir lu autre chose que du préformaté.

12 octobre 2013

Club BD, cru 2013 - 2. Hell's Kitchen

Titre: Hell's Kitchen, t.1
Auteurs: Mitsuro Nishimura et Gumi Amazi
Editeur: Dargaud, collection Dark Kana (2013)

Hell's Kitchen - 1

L'année dernière, nombre de mes élèves m'avaient demandé "plus de mangas" dans la sélection. J'ai alors essayé, dans la mesure du possible, d'exaucer leur souhait. Bien sûr, c'est mal me connaître s'ils pensent que je vais leur offrir sur un plateau du Fairy Tail ou autres Black Butler, séries qu'ils connaissent déjà et qui - à mon humble avis - se ressemblent un peu. Rien ne les empêche, cependant, de les apporter au Club: je serai ravie de les lire et de changer d'avis !

Donc, j'ai cherché des séries sur des thèmes originaux, récentes, tout public. Difficile. D'autant plus que je n'y connais en fin de compte pas grand chose, que je ne suis pas l'actualité (non plus) dans ce domaine, et que les offres sont énormes. Je me suis donc contentée, pour une première sélection, de ce que j'ai pu trouver sur le présentoir "nouveautés" de la F*ac. Et parmi ces nouveautés, Hell's Kitchen.

Un démon sorti tout droit des Enfers désire se délecter de l'âme du plus grand cuisinier. C'est bien connu, une âme de cuistot, c'est goûtu. Donc le voilà en quête du plus grand chef. Petit problème, on n'en trouve plus d'aussi bons qu'autrefois: les âmes qu'il a goûtées jusqu'à présent avaient un arrière-goût d'orgueil ou autre défaut indigeste. Il décide donc de former l'âme qu'il dévorera plus tard. Ainsi un collégien, qui ne sait même pas faire une omelette, se retrouve harcelé par un démon pour apprendre la grande cuisine.

L'idée de départ est sympathique et donne lieu à des situations cocasses. Ce n'est pas d'une folle originalité, mais ça parle de mangeaille, alors quel mal peut-il y avoir à lire ce manga ?

Le problème tient surtout au scénario. Je ne sais pas si la série est longue ou a prévu de l'être, mais un personnage qui réussi toutes les épreuves qu'on lui soumet sans broncher, je trouve ça trop facile. Un bon shonen enseigne que la réussite n'est pas systématique, et qu'il faut faire des sacrifices ou autre. Mais là, vraiment, on lit en se demandant pourquoi on n'a pas déjà fermé le bouquin au chapitre précédent. C'est divertissant, certes, mais ça ne suffit pas.

Lu il y a un mois, j'ai déjà oublié le nom des personnages.

8 octobre 2013

Des héroïnes

Club BD. Travail d'équipe. La consigne de l'atelier était: créer un héros.

Je sais, c'est vague. Avant tout il faut savoir ce qu'est un héros: personnage principal d'une fiction? demi-dieu? agit-il toujours et forcément pour le Bien? Autant de questions que je n'évoque pas, que je laisse en suspens, pour voir ce qu'ils en font. Seule aide: je leur explique ce qu'est un anti-héros (non, ce n'est pas un super-vilain), terme qui les avait laissé perplexes lors du quizz d'introduction.

Lorsque je fais le tour des équipes, après avoir croisé un hybride de Hulk et de Lapin crétin et d'autres êtres de sang-mêlé, je tombe sur une discorde. Les membres de l'équipes sont bloqués, la seule chose qu'ils savent, c'est que ce sera un garçon. Mais une des membre de l'équipe déclare qu'elle préfèrerait une fille. La question que je pose alors, "pourquoi ce choix d'un garçon?" donne lieu à une réponse qui me hérisse les cheveux sur la tête.

"Ben on peut faire plus de choses avec les garçons, on a plus de choix. Alors que les filles c'est plus délicat."

Abasourdie je suis. Et en même temps, je ne peux pas laisser passer cette chance. Je dois tenter d'ouvrir les esprits de ces petits sixième qui sont encore bercés de préjugés. En attendant de trouver une réponse mieux argumentée, je leur raconte le mythe d'Antigone, qui a défié son oncle, son roi, sa cité, la Loi, pour enterrer son frère, traître à sa patrie faisant d'elle une traitresse. Personnage de la rebelle, de l'insoumise, elle me plaît mieux que les guerrières, et sur le moment, je n'ai de pensées que pour elle, malgré sa fin tragique.

2

Hier, j'avais pris le temps d'assembler une série d'images. Je leur ai parlé alors de Médée (un héros fait-il toujours le Bien?), d'Electre, d'Antigone, d'Andromaque, puis de Clélie et Bérénice (ah, Bérénice: "vous ne trouvez pas qu'abandonner l'amour de sa vie pour une raison d'état c'est héroïque?" leur ai-je dit, enthousiaste - assentiment général "ah bah oui, quand même..."). Judith également, du côté de l'Ancien Testament. Puis Jeanne d'Arc, personnage historique devenu légende, mythe, assemblant l'héroïne guerrière et la sainte. Et après cela, place à Wonder Woman, Fantômette, Nausicaä, Eowyn, Lara Croft, Mulan... j'y ajoute même les Totally Spies, Toph et Korra, pourquoi pas?

15

Tout est bon pour leur faire comprendre que les hommes n'ont pas le privilège de l'héroïsme (et au passage que l'héroïsme n'est pas toujours dénué de cruauté et de violence, au contraire).

27 septembre 2013

Un peu d'étymologie

Depuis quelques jours, je lis avec angoisse et dégoût mon nouveau corpus de thèse. Il est constitué d'articles de synthèse sur les maladies rares. Contrairement aux résumés d'articles scientifiques, qui ne traitent que d'un élément à la fois et ne sont donc pas toujours aussi horribles que la maladie, ces synthèses sont tout à la fois complètes et détaillées sur les signes, symptômes et conséquences desdites maladies.

Alors que j'essayais de ne pas assimiler les conséquences mortelles de la maladie de Huntington, j'ai bien été obligée de me pencher sur le terme intrigant de chorea. En effet, annotant les symptômes dans les textes, j'étais condamnée à comprendre ce dont il s'agissait afin de savoir s'il fallait le surligner ou non.

Première étape, traduire l'adjectif choreatic à l'aide de G**gle. Puis chercher dans un dictionnaire (Mediadico me semblait tout indiqué) la définition de choréique. "Qui souffre de chorée", j'étais bien avancée. Et entre parenthèses, "danse de Saint Guy". Voilà qui devenait très curieux.

En réalité, le terme chorée désigne une maladie nerveuse, qui se manifeste par des mouvements involontaires et incontrôlés. On l'appelle vulgairement la danse de Saint Guy ou manie dansante.

choree

Quand on y réfléchit, on comprend pourquoi cette maladie porte un tel nom. Χορεία (khoreia) signifie "danse" en grec ancien. On retrouve le même terme quand on parle des choeurs antiques, qui dansaient dans l'orchestre suivant une chorégraphie bien définie, ou encore de Terpsichore, muse bien connue des danseurs dont le nom signifie "danseuse de charme".

terpsichore jean-marc nattier 1739

Jean-Marc Nattier, Terpsichore (1739)

Tant qu'à continuer sur la lignée étymologique de cet article, parlons un peu de Guy. Étonnamment, son martyr n'a aucun lien avec une danse ou une folie quelconque. Pourtant, c'est à lui que l'on a adressé des prières lorsqu'en 1518 une épidémie de danse a frappé les habitants de Strasbourg, dont des dizaines sont morts d'épuisement après avoir gesticulé (ou dansé, c'est selon) pendant des jours sans pouvoir s'arrêter.

Épidémie_danse

Son nom, à notre ami Guy, est germanique, et issu de la racine wid- le bois (d'où, j'imagine, le wood anglais). A ne pas confondre avec la racine wiks- qui donne, en latin, viscum, qui a donné notre gui de l'an neuf, mais aussi et surtout la viscosité, et tout ce qui est visqueux. Et la glu viendrait aussi de là, puisqu'elle est préparé à partir de la plante.

Pour finir, une petite recette de glu au gui, datant de 1855 :

"La glu extraite du gui est une des plus anciennes, quoique celle du houx soit connue depuis plusieurs siècles. Nos pères préparaient cette glu avec les baies du gui sacré, tant vénéré par les dгuides. Ils faisaient bouillir ces fruits dans l'eau, les pilaient, et passaient la liqueur chaude pour en séparer les semences et la peau; ils attribuaient à cette glu des propriétés résolutives et émollientes. Cette méthode est presque généralement abandonnée aujourd'hui, d'abord parce que le gui est plus rare, les forêts étant beaucoup moins nombreuses qu'autrefois, et que l'on préfère employer à cet usage l'écorce de la plante au lieu des baies. Le procédé mis en pratique dans ce dernier cas est assez semblable à celui que l'on emploie pour la préparation de la glu du houx. On fait pourrir l'écorce de gui dans des pots pendant dix à douze jours dans un lieu humide; on la pile ensuite et on en fait une bouillie sur laquelle on verse de temps en temps de l'eau de fontaine fraiche; puis on remue souvent le tout avec un bâton jusqu'à ce que la glu y adhère; on la place alors dans des pots que l'on recouvre d'eau que l'on a le soin de renouveler souvent." (William Duckett,Dictionnaire de la conversation et de la lecture)

Publicité
<< < 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 30 40 50 60 70 80 90 > >>
Derniers commentaires
Publicité
Archives
Publicité