Vive le grec !
Il est quatorze heures et le soleil brille sur le Panthéon. Devant les grilles, sur l'esplanade, un petit groupe est déjà formé, de gens plus ou moins connus; une chose est sûre, la majorité est helléniste.
Les professeurs et étudiants défilent derrière le haut-parleur: ils lisent le chant V de L'Odyssée. Derrière, dans la rue, les bus et camionnettes de CRS défilent, couvrant la voix des lecteurs; le vent emporte des bribes de paroles. Et des crétins trouvent bon de discuter pendant cette lecture, sans prendre la peine de baisser le ton ou de s'éloigner de quelques pas.
Le vent se lève et la pluie commence à tomber. Le chant V est abrégé, mais EF (alias Mika, vous vous en souvenez?) dansera quand même. Rien ne l'empêchera d'interpréter sa chorégraphie contemporaine, qu'il a intitulée « Odyssée V ».
Le cercle des curieux s'est élargi. Les parapluies ont fleuri. Le silence s'est installé. Et l'attention est à son comble. EF commence, et peu à peu, le soleil paraît de derrière les nuages, au milieu des lourdes gouttes de la giboulée. La lumière scintille. On pourrait presque avoir un arc-en-ciel; Iris a failli se manifester.
La chorégraphie s'achève sous les applaudissements et le soleil. Puis s'ensuit un défilé de lecteurs divers et variés, latinistes et hellénistes. Poésie, littérature engagée et transparente (« Jusques à quand, Catilina, abuseras-tu de notre patience? »). Lecture en grec dans le texte, déclamation des premiers vers de L'Iliade avec la scansion.
Prodigieux. C'est dans ces moments-là que l'on est fier d'être en Lettres Classiques.