Panta rei
Dans quelques heures, le un deviendra deux, et ce sera irréversible. La forme sèche au nez pointu s'arrondira, sûrement à cause de l'âge. Le ventre enflé, gonflé, les pieds à plat, la tête courbée, il sera bien fatigué ce deux. Un deux qui gouvernera ses confrères pour dix ans.
Le un ne laisse que peu de souvenirs heureux au tout début. Le collège, c'est le cauchemar. Mais peu à peu, les souvenirs se mettent à sourire et rêvent d'éternité, de réitération. L'un fini se veut infini. Le lycée, le premier véritable groupe d'amies, puis d'amis. Un diplôme, un saut dans l'inconnu. Des découvertes, des apprentissages. Ma foi, ce un ne fut finalement pas si mauvais.
Mais au moment où le deux se présente, je repense avec nostalgie au vide. Cette période de l'infans. Puis celle de l'enfant. Amies de garderie, maternelle. Pas de peurs, pas de pensées torturées. L'avenir alors faisait rêver. L'âge n'était pas question d'angoisse. On vivait en attendant demain.
Je vis en regrettant hier. En espérant hier. Parfois en cueillant aujourd'hui, mais rarement en recherchant de l'avenir.
Le un sera deux, et c'est irréversible.