De magia verborum
Démon ou farfadet,
Je ne sais.
Informe, ambigu, il
Négocie avec votre âme.
Noir ou blanc,
Sait-on jamais?
Un tout petit mot, cinq lettres insignifiantes. Et pourtant, tout un monde contenu dans cette simple graphie, cette sonorité si exotique. Ce mot qui résonne, tinte à mes oreilles. Un grelot, des bracelets d'argent qui s'entrechoquent sur une peau mate. Une première vision, puis une seconde. Un lutin facétieux qui joue des tours, un esprit incarné dans le corps d'une courtisane. Des couleurs chaudes, des parfums épicés. La fraîcheur d'une oasis, l'ombre d'arbres aux essences étrangères.
Des Z, Y, W, N, J et D qui s'additionnent sur ma réglette. C'est à moi de jouer. Que faire? Pas une seule voyelle à l'horizon. L'idée frappe tel l'éclair. Une vision. Il faut que je vérifie. 'Djinn'; mot compte double. Le lutin est alors un petit génie sympathique. J'adopte ce mot aux lettres rares et aux consonances si légères.
Une femme. Des voiles. Un trait sûr, simple et pur. Des couleurs chatoyantes. Irrésistiblement, je suis attirée. J'égraine les pages, je feuillette. J'achète. Je lis, je dévore. Une femme, habitée par un djinn. Un drôle de pouvoir: elle est incapable d'éprouver le moindre sentiment. Puis son démon la trahit et elle est prise à son propre jeu. Je n'en aime ce mot que davantage.
Un mot rare, oriental, coloré, chaleureux. Un simple mot, tout petit, à deux facettes. Un mot scintillant. Un mot magique...
ICI, un poème de Victor Hugo, assez impressionnant, intitulé "Djinns".