Envies
Après-demain, neuf heures, m'attendra sur ma table un magnifique sujet de littérature grecque. Socrate en retard? Aristophane et ses hommes-boules? La naissance d'Éros? En ce moment, mes six textes d'une longueur considérable m'attendent sous mon nez. Mais je n'arrive pas à m'y mettre.
J'ai très envie de finir mon dossier sur l'Apocalypse: mettre en page les illustrations de Dürer et Doré, faire quelques recherches complémentaires sur le genre ''science-fiction post-apocalyptique'', comparer assidûment les fléaux des sept coupes et les dix plaies d'Égypte...
Envie d'écrire des aventures pitoyables, de décrire des héros boulets, de dessiner des êtres ressemblant à des humains (parce que le résultat est plus que souvent douteux).
Envie de me replonger dans mes généalogies des fondateurs: écrire la vie de chacun des membres de la famille Slytherin, inventer l'origine de Helga Poufsouffle, dessiner les écus de la famille Serdaigle et créer de toutes pièces une lignée de Gryffondors.
Envie aussi de cuisiner. Passer des heures aux fourneaux, réaliser des recettes dans lesquelles je ne m'étais encore jamais lancée, et refaire mes préférées. Faire de l'hypocras. Des gâteaux. Des entremets. Et les manger.
Envie de sortir au soleil, de marcher dans la forêt, aller voir où en sont les acacias. Respirer de plus près la glycine dont le parfum me parvient par la fenêtre grande ouverte de ma chambre.
Envie de partir, de bouger. Aller à Limeuil et passer des journées abrutissantes à arracher orties et mauvaises herbes, à tondre, tailler et couper. Pour m'endormir le soir, courbaturée mais apaisée.
Parce que j'en ai assez de me dire qu'il faut que je travaille mais de ne rien faire. Assez de m'angoisser pour des devoirs qui ne compteront même pas dans la moyenne. Assez d'assister à des cours sans intérêt (pour certains) alors que le soleil brille dehors et que le beau temps nous appelle.